Une société locataire d’une pelle hydraulique fait l’objet d’une procédure collective. La pelle tombe dans un étang et son propriétaire l’en sort et reprend possession. Le liquidateur sollicite sa restitution dans la mesure où ce matériel n’avait pas été revendiqué par son propriétaire. La Cour de cassation dans un arrêt en date du 3 avril 2019 juge que le propriétaire de la pelle hydraulique louée par une société mise en liquidation judiciaire ne peut pas récupérer son bien sans le revendiquer, même si la locataire n’a rien fait pour le sortir d’un étang où elle s’était retrouvée immergée (Com.3 avril 2019, pourvoi n°18-11.247).
La sanction de l’absence de revendication par le propriétaire d’un bien dans le délai prévu par l’article L624-9 du Code de commerce ne consiste pas à transférer ce bien non revendiqué dans le patrimoine du débiteur mais à rendre le droit de propriété sur ce bien inopposable à la procédure collective. Cette sanction a pour effet d’affecter le bien au gage commun des créanciers permettant sa réalisation au profit de leur collectivité ou son utilisation en vue du redressement de l’entreprise, afin d’assurer la poursuite de l’activité, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Il a dès lors été jugé par la Cour de cassation que s’il en résulte une restriction aux conditions d’exercice du droit de propriété de celui qui s’est abstenu de revendiquer son bien, cette atteinte est prévue par la loi et se justifie par un motif d’intérêt général. Ainsi, l’encadrement de la revendication a pour but de déterminer rapidement et avec certitude les actifs susceptibles d’être appréhendés par la procédure collective afin qu’il soit statué, dans un délai raisonnable, sur l’issue de celle-ci dans l’intérêt de tous. La Cour de cassation considère dès lors que ne constitue pas une charge excessive pour le propriétaire l’obligation de se plier à la discipline collective générale inhérente à toute procédure collective, en faisant connaître sa position quant au sort de son bien, dans les conditions prévues par la loi et en jouissant des garanties procédurales qu’elle lui assure quant à la possibilité d’agir en revendication dans un délai de forclusion de courte durée mais qui ne court pas contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation confirme sa position sur la conventionnalité de la procédure de revendication et juge qu’il n’y pas d’atteinte au droit de propriété. La haute juridiction tempère néanmoins sa solution quelque peu sévère en réservant le cas où le propriétaire du bien a été dans l’impossibilité d’agir en revendication, permettant ainsi de prévoir une exception ou à tout le moins une action en relevé de forclusion.